Pleins feux sur Hamid Mesbah, Directeur Général de l’UJAP Quimper 29


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Pleins feux sur ...
Hamid Mesbah, Directeur Général de l’UJAP Quimper 29
Tout d’abord, peux-tu nous dire quel a été ton parcours et comment es-tu devenu directeur général d’un club de basket ? Quel est exactement ton rôle au sein de l’UJAP Quimper ? Enfin, Laurent, lors de son interview sur Tébéo, fait état de votre relation à Villeurbanne. Peux-tu nous en dire plus ?
Je suis un ancien joueur professionnel de handball mais à l’époque, ce n’était pas encore pro, je bossais en même temps. J’ai donc démarré à Ivry en région parisienne en division 1, dans le plus vieux club de hand français, pendant 18 ans. De petit à directeur général.
J’ai arrêté de jouer à 24 ans pour me concentrer au développement du club car je sentais que ma voie était là : diriger le club.
J’ai fait tous les postes, de secrétaire à directeur sportif puis directeur général. Je suis parti en 2000 car j’avais fait « le tour du hand ». J’aurai dû rentrer à la Fédération Française de hand pour gérer la création de la Ligue Pro car j’ai contribué à écrire le projet de création de la Ligue. Il n’y avait pas de Ligue Pro à l’époque, c’était la Fédération qui réglait la partie professionnelle.
Par la suite, j’ai été demandé par Gilles Moretton (ancien tennisman pro) qui dirigeait un groupe à Lyon et qui est venu me chercher pour gérer une société de marketing sportive. J’ai quitté Ivry en 2000, je me suis retrouvé là-bas en 2001 où je suis entré dans le groupe OCCADE Sport qui avait la régie marketing de l’ASVEL, le grand prix de tennis de Lyon, le marathon de Lyon, le marathon de Metz, un tournoi d’équitation, du volley, du patinage artistique... c’est un groupe qui avait beaucoup d’activités sportives. Je gérais donc une société de marketing sportive filiale de ce groupe et dirigé vers des clubs amateurs.
C’est un dispositif national où j’avais 16 collaborateurs et j’avais le bureau de la société à Paris, je faisais la navette entre Paris et Lyon pendant 2 ans et en 2002, j’ai été contacté pour être directeur administratif dans un club de foot de Ligue 1 de l’époque au Havre et à 1 semaine près, Gilles Moretton m’a rappelé pour venir cette fois-ci à l’ASVEL. J’étais avec un directeur exécutif qui s’appelait Antony Thiodet. On a été ensemble jusqu’en 2012 avec des titres à la clé : on a structuré le plus gros club de basket français et on a eu le mérite de faire venir Tony Parker en 2008, comme actionnaire du club. En 2008, le groupe a été vendu à Canal +, sauf évidemment l’ASVEL.
Après avoir occupé plusieurs fonctions de direction à l’Asvel, J’ai pris la direction générale en 2010 avec Laurent. J’avais géré sa reconversion professionnelle car il avait eu une grave blessure. Il était encore sous contrat. Je l’ai donc accompagné car il ne savait pas ce qu’il voulait faire. Il est devenu manager général après une formation. Je ne gérais que la partie « hors sportive ». Je m’entendais très bien avec Tony Parker.
J’en suis sorti en 2012 et en 2013, j’ai accompagné Tony Parker sur tous ses projets de développement. Ensuite, j’ai cherché un poste qui n’existait pas, il y avait du monde partout et pas beaucoup de postes. J’ai eu des doutes. J’ai pensé qu’il fallait que je change de métier car je peux gérer n’importe quelle entreprise et finalement, quand on va dans des cabinets de recrutement qui ne sont pas du tout spécialisés, on vous dit « le sport, on ne connaît pas, vous ne valez rien sur le marché ». A quarante et quelques années, ça te fait un coup derrière la tête. Mais j’ai persévéré et j’ai monté une société de consulting qui s’appelait HM Sports Conseils. J’ai accompagné des clubs de 2ème et 3ème division dans différents sports, un peu partout en France.
Je n’arrivais pas à en vivre correctement car, soit tu vas dans les grands clubs et tu fais peur, ils ne te laissent pas rentrer, soit tu vas dans les petits clubs et ils ne veulent pas te payer. En gros, dans le sport, c’est compliqué !!!
Donc, en 2016, j’ai été contacté par l’avocat de Tony Parker, qui est celui aussi de Boris Diaw. Celui-ci avait un club, la JSA Bordeaux, qui était en grande difficulté, qui est descendu de 2 divisions coup sur coup entre la Pro B, N1 et N2. Il m’a donc appelé pour aller voir ce qui se passait. C’était très compliqué à gérer. J’y ai passé un an et il a décidé de déposer le bilan et d’arrêter. Je me suis donc retrouvé sur le marché. Ensuite, je suis venu ici grâce à Laurent qui m’a présenté aux dirigeants pour faire un audit du club. C’était l’année où l’UJAP était en N1 et avait réussi à monter en Pro B. On a donc décidé de continuer l’aventure. Je suis arrivé à Quimper le 1er juin 2017. Avec beaucoup de similitudes avec mon ancien club de hand. En effet, dans les années 90, Ivry était le plus gros club français de hand, avec très peu de moyens, la mairie ne voulait pas investir, ne pas s’engager dans le professionnel, c’était compliqué mais on a réussi à faire des choses extraordinaires avec beaucoup d’humilité, d’humain, un peu d’argent… je retrouve donc des similitudes avec Quimper mais ici avec plus d’expérience, un réseau et j’ai retrouvé Laurent.
L’avantage, c’est qu’on ne se marche pas dessus, moi j’empiète très peu sur le secteur sportif en dehors de la relation avec les agents, les contrats de travail, etc.., on se respecte, on est amis, je l’ai toujours soutenu même dans les pires moments. Je suis content.
J’ai tout appris sur le terrain… Villeurbanne m’appelait « le couteau suisse » car j’ai fait tous les postes !! Et ça fait 35 ans !
Quant à Laurent, après sa blessure en 2010, il a fait une formation de manager général. On a mis les moyens autour de lui pour qu’il puisse se développer. Il y avait un autre joueur en fin de carrière, Aymeric Jeanneau, qui était à Strasbourg et qui part à La Rochelle prendre la Direction Générale en N1. Ça s’est fait naturellement. Il m’a dit banco et moi, je l’ai accompagné dans son développement mais pas du tout pour être entraîneur, c’était pour gérer. Un manager général, dans un club, pour moi, c’est plus un directeur sportif, c’est quelqu’un qui va gérer tous les aspects du secteur sportif. C’est comme ça qu’il a occupé cette fonction là-bas jusqu’en 2013.
Le club a-t-il les moyens d’atteindre la Jeep Elite ?
Objectivement, aujourd’hui, non. Pas sans une salle adaptée.
Je voulais aussi parler avec toi des structures du club et en particulier de la salle. Y a-t-il des possibilités d’améliorer encore la salle Michel Gloaguen ?
Il n’y en a aucune. On est au bout du bout de ce qu’on peut faire, on a optimisé au maximum le moindre m² et aujourd’hui, on se retrouve avec le même problème qu’il y a 3 ans. C’est à dire qu’on est saturé de partout : quand on avait notre vieux chapiteau, maintenant, on a pratiquement 580 VIP à chaque match, on est plus qu’au taquet au niveau sécurité. On n’a aucune possibilité donc, c’est impossible d’aller dans la division supérieure sans un outil de travail adapté. Admettons que cette année était amenée à monter, en plus c’est une saison qui sur le papier, paraît à notre portée pour y arriver, au même titre que Nancy ou Blois, on se rend compte qu’aujourd’hui, aller au-dessus... la marche est haute structurellement, économiquement. Il faudrait avoir un budget entre 3,8 millions et 4 millions et on a un budget de 1,9 millions...donc, c’est compliqué !!! Mais on est des compétiteurs, il y a les joueurs sur le terrain, moi je suis en dehors du terrain, les dirigeants aussi mais on est tous des compétiteurs et on a envie de relever le challenge. Maintenant, c’est sûr, sans outil de travail, pérenniser à ce niveau-là, c’est impossible. Donc, il faut prendre notre mal en patience. Il faut surtout arriver à préserver cet équilibre jusqu’à, on espère une nouvelle salle. Une montée ça ne se refuse pas si ça arrive on continuera à déplacer des montagnes avec les dirigeants.
Moi, ma crainte, aujourd’hui, c’est notre capacité de ne pas disparaître entre maintenant et l’entrée dans une nouvelle salle, car on est monté très vite, on a beaucoup bossé, on s’est beaucoup battus.
Ce qu’on revendique, ça paraît légitime car on est sur un territoire où il n’y a pas de foot, pas de rugby, les 2 sports qui prennent tous les droites télés...Là, on est sur un sport, comme le hand, de ville moyenne, de province. Mais on est le sport n°1 à Quimper et moi, je n’ai pas honte de le dire, on a travaillé pour ça et la volonté, c’est de se dire qu’on est tous de passage dans un club, que ce soit bénévole, salarié, dirigeant. Moi, mon boulot, car c’est mon métier, c’est de faire qu’il y aura un club dans 10 ans.
Si on n’a pas d’outil de travail, on n’arrivera même pas à se maintenir en Pro B. Là, on est parti de très bas, on a failli descendre dès la 1ère année, et là, on est très haut. Si on arrive à rester très haut cette année, c’est bien mais quid de la saison prochaine ?
Est-ce qu’on va se faire dépouiller de joueurs ? Est-ce qu’on va monter ? Si on se maintient, avec quels joueurs ?
Et avec Laurent comme entraîneur ?
Non je pense qu’il n’y a pas de danger à court terme là-dessus. On est un club où on travaille dans la sérénité, ça c’est important. On a de grands défauts dans les clubs : l’impatience des dirigeants, le résultat à court terme, l’impatience des médias, il faut gagner tout de suite et si tu as perdu plusieurs matchs, c’est de la faute du coach, des joueurs, mais par contre, si on a gagné, c’est tout le monde qui a gagné ! Ici rien de tout ça.
Moi, ce n’est pas les valeurs que je porte, donc à un moment, on est tous responsables dans la défaite et dans la victoire. Aujourd’hui, on est en haut de l’affiche, on va essayer d’y rester, mais en tous cas, il n’y a pas de volonté de Laurent de passer sur un autre challenge. C’est sûr, il sera à un moment sur le marché, ça c’est normal, comme moi je l’ai été aussi. J’ai eu des propositions pour partir, je les ai refusés parce que je n’ai pas envie d’abandonner un projet en cours de route.
L’avantage de ce projet, c’est qu’on est maçon et architecte en même temps : il faut construire, mettre les mains dans le cambouis, porter des meubles, aller négocier des actionnaires. C’est ce qui est très intéressant, avec des dirigeants qui n’ont pas de problème d’égo, des gens remarquables, plein d’humilité, humainement hors normes, on travaille dans la sérénité et ça c’est un luxe.
As-tu un intérêt pour d’autres sports ?
Oui, pour le hand et j’adore le badminton, c’est un sport que j’ai pratiqué en arrêtant le handball. C’est un sport où il y a des vraies valeurs comme au hand. J’aime beaucoup. Je n’ai pas le temps de regarder du hand, j’ai vraiment coupé avec ce sport car le basket prend beaucoup de place dans la tête, je préfère être dans une salle que de regarder la télé.
Quelles sont tes passions hors du sport ?
Je suis un épicurien. Dans mon environnement, j’ai beaucoup de restaurateurs, partout en France, pour moi, c’est une vraie passion parce que le sport et la « bouffe » sont des métiers de passion, de partage, il y a beaucoup d’empathie. Quand j’avais 17 ans, mon père m’avait inscrit au concours de l’école Méderic, l’école hôtelière à Paris, et je ne me suis pas présenté parce que je voulais rentrer au Centre de Formation du club. Je me suis fait « pourrir par mon père parce qu’à l’époque, quand tu disais que tu voulais travailler dans le sport, tout le monde rigolait, ce n’était pas un vrai métier. Et j’ai finalement démontré que ça en était un.
La restauration est une vraie passion, c’est moi qui cuisine, j’adore ça, évidemment moins ici car je suis tout seul à Quimper, ma famille est à Lyon, j’ai moins le temps, de plus c’est un boulot qui prend du temps. Oui, j’adore, mon père était cuistot une partie de sa vie et j’aime bien partager ici dans les restaurants de Quimper, au Prieuré parce que c’est Ludo, un ami, et qu’on aime bien parler gastronomie et j’ai beaucoup d’amis dans ce domaine.
Que représente pour toi un dimanche idéal ? Peux-tu nous citer un film ou un livre pour un dimanche pluvieux par exemple ?
Le dimanche, soit je ne fais absolument rien parce que c’est le seul jour à peu près tranquille pour récupérer et en même temps, je déteste cette journée car je la trouve triste et longue. C’est une journée où j’aime bien faire des brunchs, j’aime bien bruncher. Je retourne sur Lyon de temps en temps, quand je peux mais sinon, j’aime bien faire un brunch avec mes collaborateurs, le dimanche, en fin de matinée quand on peut. Ça détend. Sinon je ne fais rien le dimanche parce qu’ici c’est pratiquement du 6 jours sur 7, sans arrêt ...il faut un peu de temps calme.
Des films, j’en ai plein parce ce que je suis un vrai cinéphile, je me mange des films dans tous les sens, dans tous les supports qui existent, alors un film qui a fait scandale dans les années 70, c’est « Orange Mécanique ». Moi, j’adore Kubrick, il dérange et tous les films de Tarentino, et de Clint Eastwood. Je suis passionné par ces gens qui sont des personnages hors normes, qui traversent les temps, les époques. Je suis aussi un passionné de James Bond surtout l’époque de Sean Connery, je trouve que c’est celui qui avait le plus de classe et donc je me les passe en boucle.
Et un livre, je n’ai pas beaucoup le temps de lire, avant je le prenais. A Lyon, j’ai 300 BD, j’adorais la BD, notamment tout ce qui est Black et Mortimer et après, je me suis passionné de quelqu’un qui dérange aussi beaucoup, c’est Alain Finkielkraut, j’aime bien ses bouquins, j’aime bien ce type, il dit tout haut ce que tout le monde dit tout bas, donc ça me plaît bien.
Je crois que tu aimes beaucoup la musique aussi. Lesquelles et une en particulier ?
Je suis un passionné de rock et de hard rock, je suis un malade d’ACDC depuis que j’ai 11 ans. Je les ai vus 14 fois, en concert, je suis un vrai fan de rock c’est pour ça que je suis triste en France car c’est le seul pays d’Europe où on n’écoute plus beaucoup de rock , tu vas en Allemagne, en Angleterre , même si le rap a pris énormément de place mais le rock, tu avais des personnages comme Jimmy Hendrix, des gens comme ça , et puis j’adore les années 80 , donc je suis allé voir plein de concerts des stars 80 et je suis content de voir que même les jeunes, en boîte de nuit, réécoute des morceaux comme ça. Donc, c’est génial. C’est en train de revenir, c’était une époque de création et il y en a de moins en moins aujourd’hui. Tu te demandes dans 10 ans, qu’est-ce que tu vas aller voir en concert ?
Quand tu as un festival les plus grands d’Europe comme Les Vieilles Charrues qui s’est fait grâce au rock, qu’est-ce qui va passer dans 10 ou 15 ans ? Du rap, moi ça ne m’intéresse pas.
Quelle serait l’escapade idéale pour un week-end ?
Lisbonne, Porto… Tout le bassin méditerranéen. Je suis un accro des voyages, j’ai énormément voyagé, je continue, cette année, ça va être le Pérou. Moi je ne tiens pas en place, il faut que je bouge, donc grâce au sport, j’ai beaucoup d’amis aux 4 coins de la France et de l’Europe, alors dès que je peux m’échapper, je prends l’avion, moi j’adore être dans un avion. Dès que je peux partir, je pars. Au Pérou, j’y vais avec ma famille, des amis, on voyage beaucoup en groupe, on adore explorer, découvrir, on aime bien les pays où tu manges bien justement. On n’a pas fait encore l’Amérique du Sud donc on va commencer. Autrement, je suis vraiment un passionné de l’Asie et un jour j’irai peut-être habiter en Thaïlande, les gens sont gentils, ils sont prévenants, ils t’offrent et partagent tout ce qu’ils ont. En plus, il y a des paysages magnifiques.
Quand ici, par exemple, un massage vaut 80 euros, là-bas, il est à 8 euros !!!
C’est vraiment très beau et agréable à vivre.
Enfant, tu allais en vacances à Forêt-Fouesnant. Tu as un souvenir particulier ?
Effectivement, j’allais en vacances avec ma tante et mon oncle pendant 16 ans. J’étais toujours dehors et le souvenir qu‘il me reste le plus, c’est quand j’allais à la pêche avec mon oncle. Les retours de pêche, oui c’est un grand souvenir.
Enfin, si tu avais à partager un moment avec une personnalité sportive ou autre, quelle serait-elle et pourquoi ?
Avec une personnalité sportive, non car j’ai déjà connu plusieurs personnes importantes comme Tony Parker, et d’autres, des grands joueurs de hand aussi… Non plutôt, j’aurai aimé passer une journée avec le guitariste d’ACDC, Angus Young, grand guitariste. C’est un groupe que j’adore.
Propos recueillis par Françoise Bazin. Merci !